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Reflets du Passé

Actualité de l'auteur et de sa collection aux éditions Dualpha, ayant vocation à exhumer des textes toujours d'actualité. Thèmes abordés : Magie,illusionnisme, prestidigitation, ésotérisme. Pour tous contacts avec la rédaction de ce blog, pour poser vos questions, et pour être averti de nos nouvelles mises en ligne : refletsdupasse@gmail.com Attention tous les textes mis en ligne sur ce blog sont soumis au Droit d'Auteur.

dimanche 29 avril 2012

CIRCE die ZAUBERIN (sur scène entre 1894 et 1920)

De nombreuses illustrations mystiques de femmes fleurissent dans les iconographies des années 1900. Citons les peintres Franz von Stuck (1863 1928), John William Waterhouse (1849-1917), Dante Gabriel Rossetti (1828-1882) et Edward Burne-Jones (1833-1889). Dans ce romantisme, emprunt de références légendaires (et païennes), notons la magicienne allemande Circé, dont il ne subsiste pas d’éléments biographiques, en dehors d’une affiche dont le reprint est aujourd’hui commercialisé par de nombreux sites de ventes en ligne. Son nom de scène renvoie implicitement à l’ouvrage de Daniel Faber publié en 1699 « Die Zauberin Circe », et à celui plus contemporain de Georg Julius Leopold Engel, Zauberin Circe : Roman, publié dans les années 1920. Notre magicienne allemande est référencée comme artiste de la scène berlinoise en 1894 par Augusta Harriet (Garrigue) Leypoldt. Artiste de cirque, puis de music-hall. © Un Tour du Monde de la Magie et des Illusionnistes. Les reproductions totales ou partielles des notices du blog Reflets du Passé sont soumises au droit d’Auteur.

CODE SECRET (un aperçu).

L’invention du terme « seconde vue » est l’oeuvre du prestidigitateur Robert Heller. Il troque sa perruque, son accent français et son piano, pour devenir un prestidigitateur (basé à Washington). Heller (né Palmer, 1826-1878) profite d’une certaine vacuité scientifique et de son inventivité, pour s’engouffrer dans le mystérieux, répondant ainsi aux attentes d’un public avide de merveilleux. Il propose des divinations, des interprétations basées (selon ses dires) sur des messages subliminaux. L’illustration du plastron et du visage de Robert Heller décline ici un code destiné à ses assistants, comme autant d’indications (jouant dans les deux sens). Le site http://longstreet.typepad.com/thesciencebookstore/ revient longuement sur cette mise en scène où des objets disséminés dans la salle et sur la scène servaient de relais.

DURVILLE, Henri (1887-1963).

Éditeur (La Librairie du Magnétisme), auteur, magnétiseur. Frère d’Hector Durville (le fondateur en 1893 de l’École pratique de Massage et de Magnétisme située 36 avenue Mozart à Paris, et de l’Ordre Eudiaque). Henri enseigne dans l’école d’Hector « les principes de physique dynamique ». Il reste le propagateur incontournable d’une forme de magnétisme, décliné comme une science nouvelle. On connaît moins son goût pour le cirque et la magie. Il publie de nombreuses explications de tours dans une série intitulée Les trucs de la prestidigitation, publiée entre 1917 et 1922. Chaque étude (en moyenne de quatre pages) était illustrée. Ces documents furent édités et vendus séparément. Christian Fechner dans sa Bibliographie de la prestidigitation Française et des Arts annexes, (Boulogne, éditions F.C.F, 1994), recense soixante-treize études (p. 183). Il semblerait pourtant, au gré de nouvelles découvertes bibliophiles que l’ensemble soit plus conséquent. Citons : Une séance de Magie noire. Les meurtres du fantôme. Le Secret de la cage spirite. Le Mystère des apparitions spirites : Le buste qui parle, Le décapité vivant. Le couteau magnétique. Une expérience de double vue. Une expérience de suggestion mentale. Expérience des gurus de l'Inde. La chance infaillible au jeu. Les cartes magnétisées. Les cartes magiques. La lévitation des cartes. Lévitation d’une table. La lucidité et le jeu. Le carillon spirite. La coupure des Aissaouahs. La suprême initiation des Aissaouahs. L’Inde mystérieuse : la pousse instantanée d'un arbuste. Expérience des gurus de l’Inde. La bouteille magique. Les Hauts pouvoirs du Fakir. Le pouvoir extraordinaire du Fakir. Mystérieux pouvoir du Talisman. La germination instantanée des grains de blé. La végétation magique. La force irrésistible de la volonté. Le meurtre du fantôme. Les fantômes. Une expérience stupéfiante. Une expérience spirite stupéfiante, la dématérialisation du corps et sa reconstitution par les Esprits. Attouchements spirites. L’armoire mystérieuse et les liens spirites. L’armoire à métamorphose. Les ardoises spirites. Manifestations d’outre-tombe, les coups frappés. Phénomènes de lévitation (trucs exécutés sans planches). Phénomènes de lévitation (trucs exécutés au moyen d’une planche). Le portrait mystérieux : il disparaît et réapparaît selon la volonté de l'opérateur. Pour forcer la volonté. Un Pouvoir extraordinaire de Suggestion. Une suggestion irrésistible. La Lecture à travers les corps opaques. Le secret de la mémoire. Lecture rapide de la pensée. La lecture sans le secours des yeux. Le sarcophage mystérieux. les Trucs du Medium Bénévol (voir notice). Le miroir magique. Bibliographie : Christian Fechner, Bibliographie de La Prestidigitation Française et des Arts Annexes, Boulogne, Éditions F.C.F., p. 182, 1994. Richard Raczynski, Essai sur un dictionnaire du Martinisme, éditions Dualpha, 2009. © Un Tour du Monde de la Magie et des Illusionnistes. Les reproductions totales ou partielles des notices du blog Reflets du Passé sont soumises au droit d’Auteur.

samedi 28 avril 2012

MYR, André et MYROSKA

Myroska, êtes-vous avec moi ? Couple de magiciens mentalistes français des années 1960 au répertoire basé sur la transmission de pensée dans un registre identique à celui des couples d’illusionnistes polonais Polowsky et australiens Maudeena et George Waldo Heller (en 1900). Myr (décédé le 14 décembre 1995) avait fait ses premiers pas dans l’univers du music-hall comme chansonnier, Myroska (disparue en 1998) était commerçante. L’aura de leur succès international demeure aujourd’hui intacte. Ils maîtrisaient conjointement une forme de stéganographie dit art de la dissimulation dont l'objet est de faire passer inaperçu un message délivré depuis un texte en apparence anodin (voir notice). Ils furent immortalisés par l’humour de Pierre Dac (1893-1975) dans Madame Arnica et avec Francis Blanche (1921-1974) dans Le Sâr Rabindranath Duval (1957) et le célèbre : « Pouvez-vous le dire, il peut le dire ! ». Myr et Myroska se contentaient malicieusement de clôturer leur spectacle par cette phrase sybilline : « Avouez que s’il n’y a pas de truc, c’est formidable, mais s’il y a un truc, reconnaissez que c’est encore plus formidable. » Bibliographie : In L’Escamoteur, sous la direction de Robelly, années 1947 à 1951, (La voyante Myroska) p. 1869. Scènes et Pistes, n° 156, 1971. Scènes et Pistes, n° 205, 1977 Monica J. Renevey, Le Grand livre du cirque, Bibliothèque des arts, 1977. Henri Broch, Gourous, Sorciers et Savants, Odile Jacob, 2006. Myr et Myroska, in Revue de la Prestidigitation, (souvenirs) chroniques et portraits, n° 431, avril 1991. © Un Tour du Monde de la Magie et des Illusionnistes. Les reproductions totales ou partielles des notices du blog Reflets du Passé sont soumises au droit d’Auteur. Extrait du chapitre consacré au mentalisme dans l’excellent ouvrage collectif : Le Paranormal démystifié par les Sciences, de Elie Volf, Benjamin Lisan et Antoine Thivel (Collaboration de Jocelyn Bézecourt, Eric Lowen), accessible intégralement sur : http://benjamin.lisan.free.fr/EcritsScientifiques/pseudosciences/ParanormalDemystifieParLesSciences.htm#_ftn368 qui revient sur Myr et Myroska : « Selon le mentaliste Pascal de Clermont (in Le mentalisme - ces pouvoirs que nous avons tous, 2003), le mentalisme utilise le potentiel extraordinaire de notre cerveau, tandis que pour un autre mentaliste, Eric Fearson, il est une plongée unique et fascinante au cœur de l’esprit humain. Il s’agit en fait d’une branche de l'illusionnisme jouant sur une présentation théâtrale du Paranormal. Il combine certaines techniques de pointe de la psychologie et de la communication. Il joue aussi sur l’intuition du spectateur, mais il demande généralement une très grande concentration et des capacités de mémorisation de la part du mentaliste. Le mentalisme fait souvent intervenir des processus de persuasion psychologique comme ceux de l’effet Barnum, pour influencer le spectateur. Pour réussir, ces illusions doivent être « communicatives » auprès du public. Dans les années 60, le couple célèbre de mentalistes « Myr et Myroska » se déclaraient mentalistes et illusionnistes (et non médiums...). Myroska, les yeux bandés devait par exemple deviner ce que son compagnon et complice Myr avait dans sa main, en général un objet prêté par le public. Pour communiquer entre eux, Myr et Myroska utilisaient un code complexe dissimulé dans les phrases échangées, utilisant non seulement les mots, mais aussi les silences. Contrairement à certains mentalistes qui prétendent sérieusement avoir des pouvoirs paranormaux, Myr terminait leur spectacle par le célèbre : « S’il n’y a pas de truc, c’est formidable, mais s’il y a un truc avouez que c’est encore plus formidable ».

GABRIELLI, Cesare ou Gabbrielli (1881-1943).

Magicien italien. Hypnose, spiritisme, mentalisme. Il débute son apprentissage de la vie professionnelle par une succession de durs « petits métiers ». Malgré les interdits énoncés par le régime fasciste, il se produit en détournant l’objet même de sa magie, en présentant avec sérieux l’hypnose et toutes les formes de magnétisme. Il connaît une carrière prolixe, donnant de nombreuses représentations au profit d’œuvres charitables. Dans ce cadre, il utilise son magnétisme (qui s’écrit au conditionnel) pour soulager des spectateurs malades venus à ses représentations. Il fait une apparition (sous les traits du magicien Cipolla) dans un film du réalisateur Vittorio De Sica (1901-1974), I bambini ci guardano en 1943, sorti en France en 1949 sous le titre : Les Enfants nous regardent. Il décède en pleine gloire à Milan en 1943. Il inspire l’écrivain allemand Thomas Mann (1875-1955) dans sa nouvelle : Mario und der Zauberer (Mario et le magicien) publié en 1930, interprété en 1994 par l’acteur autrichien Klaus Maria Brandauer dans l’adaptation cinématographique éponyme. Thomas Mann l’avait vu dans un numéro d’hypnose au Grand Hôtel de Forte dei Marmi, une commune de la province de Lucques en Toscane. L’écrivain italien Roberto Fertonani précise qu’il est né à Pontedera (province de Pise, Toscane) en 1881 et décédé à Firenze (Florence) en 1943. D’après ces dates biographiques, comment peut-il hypnotiser, en 1947, dans un théâtre de Val di Fiemme (une vallée italienne située dans les Dolomites) l’écrivain Dino Buzzati (1906-1972) ? Ce dernier décrit dans son article (in Corriere Della Sera du 3 septembre 1965) Gabrielli, vieux fantôme, sa rencontre avec le magicien. Une explication logique existe probablement, qui verrait sous les traits du vieux Gabrielli, ceux de son fils grimé Danilo, qui perpétua la tradition jusqu’en 1959, année durant laquelle il tente de se suicider dans la salle d’attente de son impresario. Bibliographie : Tulio Kezich, L’enigma del Mago Gabrielli, in Corriere Della Sera, 31 août 1994. © Un Tour du Monde de la Magie et des Illusionnistes. Les reproductions totales ou partielles des notices du blog Reflets du Passé sont soumises au droit d’Auteur. lien : http://www.triesteillusion.it/prestigiatori-del-passato/gabrielli.html

samedi 21 avril 2012

BINET, Alfred (1857-1911).

Docteur ès sciences, Lauréat de l'Institut (Académie des Sciences et Académie des Sciences morales) Directeur du laboratoire de psychologie physiologique de la Sorbonne (Hautes-Études), passionné de prestidigitation. Inventeur des premiers tests psychométriques. Proche du professeur Marey (1830-1904) et de Georges Méliès (1861-1938), il encourage le premier film « de trucs » interprétés par les magiciens Arnould (1850-1920) et Raynaly (1842-1918) tourné par Georges Demenÿ (1850-1917). Auteur de : La Psychologie de la prestidigitation, revue des deux mondes, 15 octobre 1894, pp. 903-922. Article in L’illusionniste, journal des prestidigitateurs amateurs et professionnels n° 36, décembre 1904 (in © Un Tour du Monde de la Magie et des Illusionnistes). Il signe La Suggestibilité en 1900. Cette oeuvre étant aujourd’hui dans le domaine public en voici un extrait, qui relate la suggestibilité proprement dite ou obéissance où la prestidigitation n’est pas en reste : « Etre suggestible ou être autoritaire, voilà un dilemme qui se pose à propos de chaque individu : le succès de toute une carrière en dépend et on peut dire que les autoritaires—toutes choses égales d'ailleurs, c'est-à-dire si la mauvaise fortune, l'inconduite, etc., ne se mettent pas en travers—ont bien plus de chance d'arriver dans la vie que les suggestibles. On ne pourrait pas citer beaucoup d'individus ayant atteint de hautes situations qui manqueraient d'autorité. L'autorité peut remplacer toutes les autres qualités intellectuelles ; dans un cercle, quel est celui qu'on écoute ? ce n'est pas le plus intelligent, celui qui pourrait dire les choses les plus curieuses ; c'est celui qui a le plus d'autorité, dont le regard est volontaire, dont la parole, pleine, sonore, articule lentement des phrases interminables, dont tout le monde supporte respectueusement l'ennui. Il y a plaisir à analyser, témoin invisible, une conversation de cinq ou six personnes, à laquelle on ne prend aucune part ; on voit de suite quel est celui qui fait de la suggestion ; celui-là guide la conversation, en règle l'allure, impose son opinion, développe ses idées ; puis il y a parfois lutte ; un autre, plus ferré sur un certain terrain, prend l'avantage et réussit à se faire écouter. Un interlocuteur nouveau peut changer complètement l'état des forces, car, chose surprenante, l'autorité est une qualité toute relative ; une personne A en exerce sur B, qui en exerce sur C, et C à son tour tient A sous son autorité. La manière d'affirmer, le ton de la voix, la forme grammaticale peuvent révéler celui qui a de l'autorité : il y a des phrases modestes comme : «je ne sais pas», ou «je vous demande pardon», qu'un homme d'autorité affirme avec éclat. Certaines qualités physiques augmentent l'autorité ; la conscience de sa force en donne beaucoup. Un sportsman de mes connaissances, qui fait le courtier de commerce, disait que le secret de son aplomb réside dans sa conviction de ne jamais rencontrer des poings plus forts que les siens. Le costume ajoute aussi à l'autorité, le costume militaire surtout, ainsi du reste que tout ce cérémonial dont Pascal s'est moqué, mais dont il a parfaitement compris le sens. Le nombre est aussi un facteur important : douze individus en groupe qui regardent un individu isolé exercent sur lui une autorité énorme ; malheur à celui qui est seul. On a parfaitement ce sentiment quand on croise, isolé, dans une rue de village, une compagnie de militaires qui vous regardent : il faut beaucoup d'autorité pour soutenir tous ces regards, et l'homme timide se détourne. Cette influence de masse, nous l'avons vue et en quelque sorte mesurée, M. Vaschide et moi, dans des expériences que nous faisions récemment dans les écoles sur la mémoire des chiffres. Ces expériences avaient lieu collectivement ; nous réunissions dans une classe dix élèves ou davantage, et après une explication, nous dictions des chiffres que les élèves devaient écrire de mémoire, sans faire de bruit, sans plaisanter et sans tricher. Nous étions deux, et seuls pour maintenir la discipline ; les jeunes gens avaient de seize à dix-huit ans, parisiens, et passablement bruyants ; nous n'avions sur eux aucune autorité matérielle, ne pouvant pas leur infliger de punition ; enfin, l'épreuve était monotone et assez fatigante. Il nous fut très facile de constater que nous pouvions tenir en respect une dizaine de ces jeunes gens, mais dès que ce nombre était dépassé, la discipline se relâchait, les élèves étaient plus bruyants et quelques tricheries se déclaraient. Les considérations, précédentes ont surtout pour but de montrer que l'étude de la suggestion peut se faire ailleurs que dans des séances factices d'hypnotisme et sur des malades à qui on fait manger des pommes de terre transformées en oranges ; dans les milieux de la vie réelle, les phénomènes d'influence, d'autorité morale prennent un caractère plus compliqué ; et je renvoie le lecteur curieux d'exemples à un chapitre fort intéressant, [Pages 310 et seq.] du livre du regretté professeur Marion sur l'Education dans l'Université. Tout d'abord, comment devons-nous définir, à ce point de vue nouveau, la suggestion ? Quand est-ce que la suggestion commence ? A quel caractère la distingue-t-on des autres phénomènes normaux qui ne sont point de la suggestion ? Cette définition est tout un problème, et on a dit depuis longtemps que la plupart des gens qui emploient le mot de suggestion n'en ont pas une idée claire. Il faut évidemment reconnaître comme erronée l'opinion de tout un groupe de savants pour lesquels la suggestion est une idée qui se transforme en acte [Voici une phrase cueillie dans un ouvrage tout récent : la suggestion n'est-elle pas l'art d'utiliser l'aptitude que présente un sujet à transformer l'idée reçue en acte ?] ; à ce compte, la suggestion se confondrait avec l'association des idées et tous les phénomènes intellectuels, et le terme aurait une signification des plus banales, car la transformation d'une idée en acte est un fait psychologique régulier, qui se produit toutes les fois que l'idée atteint un degré suffisant de vivacité. Au sens étroit du mot, dans son acception pour ainsi dire technique, la suggestion est une pression morale qu'une personne exerce sur une autre ; la pression est morale, ceci veut dire que ce n'est pas une opération purement physique, mais une influence qui agit par idées, qui agit par l'intermédiaire des intelligences, des émotions et des volontés ; la parole est le plus souvent l'expression de cette influence, et l'ordre donné à haute voix en est le meilleur exemple ; mais il suffit que la pensée soit comprise ou seulement devinée pour que la suggestion ait lieu ; le geste, l'altitude, moins encore, un silence, suffit souvent pour établir des suggestions irrésistibles. Le mot pression doit à son tour être précisé, et c'est un peu délicat. Pression veut dire violence : par suite de la pression morale l'individu suggestionné agit et pense autrement qu'il le ferait s'il était livré à lui-même. Ainsi, quand après avoir reçu un renseignement, nous changeons d'avis et de conduite, nous n'obéissons point à une suggestion, parce que ce changement se fait de plein gré, il est l'expression de notre volonté, il a été décidé par notre raisonnement, notre sens critique, il est le résultat d'une adhésion à la fois intellectuelle et volontaire. Quand une suggestion a réellement lieu, celui qui la subit n'y adhère pas de sa pleine volonté, et de sa libre raison ; sa raison et sa volonté sont suspendues pour faire place à la raison et à la volonté d'un autre ; on dit à cet individu : vous ne pouvez plus lever le bras, et effectivement tous ses efforts de volonté deviennent impuissants pour lever le bras ; de même, on lui affirme qu'un oiseau est perché sur son épaule, et il ne peut pas se débarrasser de cette hallucination, il voit l'oiseau, il l'entend, il est complètement dupe de cette vision. C'est ce que Sidis [The Psychology of Suggestion. New-York, 1898, p. 70.] exprime dans un langage très clair, mais un peu schématique, quand il dit qu'il existe en chacun de nous des centres d'ordre différent : d'abord les centres inférieurs, idéo-moteurs, centres réflexes et instinctifs, et ensuite les centres supérieurs, directeurs, sièges de la raison, de la critique, de la volonté. L'effet de la suggestion est d'imprimer le mouvement aux centres inférieurs, en paralysant l'action des centres supérieurs ; la suggestion crée par conséquent, ou exploite un état de désagrégation mentale. Il y a beaucoup de vrai dans cette conception, quoique la distinction des centres inférieurs et supérieurs soit un peu grossière. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de faire intervenir dans l'explication, même sous forme d'image, une idée anatomique sur les centres nerveux ; je préférerais, quant à moi, distinguer un mode d'activité simple, automatique et un mode d'activité plus complexe, plus réfléchi, et admettre que par suite de la dissociation réalisée par la suggestion, c'est le mode d'activité simple qui se manifeste, le mode complexe étant plus ou moins altéré. Un clinicien bien connu, M. Grasset, a du reste montré récemment l'inconvénient que peut présenter la schématisation à outrance des phénomènes de suggestion [Leçons de clinique médicale. L'automatisme psychologique. Montpellier, 1896.]. Cet auteur a supposé que le pouvoir de direction et de coordination résidait dans un centre spécial de l'encéphale, le centre O ; et que les actes automatiques sont produits par des centres inférieurs réunis par des fibres associatives, et formant un polygone qui se suffit à lui-même. Cette supposition lui permet de définir plusieurs cas d'automatisme et de dédoublement sous une forme qui est très pittoresque, mais qui, prise à la lettre, conduirait à de graves erreurs. La distraction, par exemple, serait une dissociation entre le centre O et le polygone : «quand Archimède sort dans la rue en son costume de bain, criant Eureka, il marche avec son polygone et pense à son problème avec son centre O.» Erasme Darwin a raconté l'histoire d'une actrice qui, tout en jouant et chantant, ne pensait qu'à son canari mourant. «Elle chantait avec son polygone, et pleurait son canari avec O.» Nous admettons qu'il y a peut-être quelque avantage, pour la clarté d'une exposition purement médicale, destinée à des étudiants en médecine, à imaginer un centre psychique supérieur et un polygone de centres inférieurs ; mais on commettrait une erreur en prenant ces hypothèses simplistes au pied de la lettre. Ce centre O, qui ressemble un peu trop à la glande pinéale dans laquelle Descartes logeait l'âme, que devient-il dans les dédoublements de personnalité analogues à ceux de Felida qui vit, pendant des mois, tantôt dans une condition mentale, tantôt dans une autre ? Peut-on dire que l'une de ces existences est une vie automatique, (polygonale, sous-association de O) et que l'autre de ces existences est une vie complète (avec le polygone et O synthétisés) ? Evidemment non ; et l'embarras de Grasset à s'expliquer sur ce point (voir la page 98) montre le défaut de la cuirasse qui existe dans la théorie. Il n'y a point de séparation nette entre la vie psychique supérieure et la vie automatique, au moins à notre avis ; la vie automatique, en se compliquant, en se raffinant, devient de la vie psychique supérieure, et par conséquent, nous pensons qu'il est inexact d'attribuer à ces formes d'activité des organes distincts. Le premier caractère de la suggestion est donc de supposer une opération dissociatrice ; le second caractère consiste dans un degré plus ou moins avancé d'inconscience ; cette activité, quand la suggestion l'a mise en branle, pense, combine des idées, raisonne, sent et agit sans que le moi conscient et directeur puisse clairement se rendre compte du mécanisme par lequel tout cela se produit. L'individu à qui on défend de lever le bras, rapporte Forel [Quelques mots sur la nature et les indications de la Thérapeutique suggestive. Revue médicale de la Suisse romande, décembre 1898.], est tout étonné et ne comprend pas comment il peut se faire que son bras soit paralysé ; ce procédé de paralysie, qui s'est réalisé en lui, et qui est de nature mentale, reste pour lui lettre close ; de même, l'hystérique à qui l'on fait apparaître une photographie sur un carton blanc, tiré d'une douzaine de cartons tous pareils, et qui retrouve ensuite ce carton [Voir Magnétisme animal, par Binet et Féré, p. 166 et seq.], ne peut pas nous expliquer quels sont les repères qui la guident ; ce sont des repères qui sont inconscients pour elle, et cette inconscience est un caractère de la dissociation. Enfin, pour achever cette rapide définition de la suggestion, il faut tenir compte d'un élément particulier, assez mystérieux, dont nous ne pouvons donner l'explication, mais dont nous connaissons de science certaine l'existence, c'est l'action morale de l'individu. Le sujet suggestionné n'est pas seulement une personne qui est réduite temporairement à l'état d'automate, c'est en outre une personne qui subit une action spéciale émanée d'un autre individu ; on peut appeler cette action spéciale de différents noms, qui seront vrais ou faux suivant les circonstances : on peut l'appeler peur, ou amour, ou fascination, ou charme, ou intimidation, ou respect, admiration, etc., peu importe : il y a là un fait particulier, qu'il serait oiseux de mettre en doute, mais qu'on a beaucoup de peine à analyser. Dans les expériences d'hypnotisme proprement dit, ce fait se produit surtout par ce que l'on appelle l'électivité ou le rapport ; c'est une disposition particulière du sujet qui concentre toute son attention sur son hypnotiseur, au point de ne voir et de n'entendre que ce dernier, et de ne souffrir que son contact. On a du reste décrit longuement les effets de l'électivité non seulement pendant les scènes d'hypnotisme, mais encore en dehors des séances [Voir Pierre Janet. L'influence somnambulique et le besoin de direction, Revue philosophique, février 1897.]. Les premières expériences méthodiques, de moi connues, qui ont été faites sur des sujets normaux pour établir les effets de la suggestion en dehors de tout simulacre d'hypnotisme, sont celles du zoologiste Yung, de Genève [E. Yung. Le sommeil normal et le sommeil pathologique. Paris, Doin.]. Cet auteur les a décrites un peu brièvement dans son petit livre sur le sommeil hypnotique. Il raconte que dans son laboratoire, ayant à exercer des étudiants à l'usage du microscope, il mettait sur le porte-objet une préparation quelconque, il décrivait d'avance des détails purement imaginaires, puis il priait les débutants de regarder, de décrire à leur tour ce qu'ils voyaient ; très souvent, dit-il, les étudiants ont attesté qu'il voyaient les détails annoncés par leur professeur ; quelques-uns même les ont dessinés. Le fait est intéressant, sans doute ; mais on voudrait plus de détails ; peut-être n'ont-ils fait le dessin que par pure complaisance, parce qu'ils voulaient faire plaisir à leur futur examinateur, et il n'est pas certain qu'ils aient cru voir ce qu'ils ont dessiné. Sidis [Op. cit., p. 35.] a fait dans le laboratoire de Münsterberg, à Harvard, des recherches analogues. Il faisait asseoir son sujet devant une table, et le priait de regarder fixement un point d'un écran ; cette fixation avait lieu durant vingt secondes ; pendant ce temps-là, le sujet devait chasser toute idée et s'efforcer de ne penser à rien ; puis brusquement, on enlevait l'écran, découvrant une table sur laquelle divers objets étaient posés, et il était convenu que lorsque l'écran serait enlevé, le sujet devait exécuter, aussi rapidement que possible, un acte quelconque laissé à son choix. L'expérience se déroulait en effet dans l'ordre indiqué ; seulement, quand l'écran était enlevé, l'opérateur donnait à haute voix une suggestion, comme de prendre un objet placé sur la table, ou de frapper 3 coups sur la table. Cette suggestion de mouvements et d'actes n'a pas été infaillible, puisqu'elle s'adressait à des personnes éveillées ; cependant Sidis rapporte qu'elle réussissait dans la moitié des cas. Ceux même qui n'obéissaient pas paraissaient parfois impressionnés, car il en est quelques-uns qui restaient immobiles, comme frappés d'inhibition, incapables d'exécuter le plus petit mouvement. Parmi ceux qui obéissaient, il s'en est trouvé un, jeune homme très intelligent, qui exécutait à la manière d'un mouvement réflexe l'acte commandé. Quant aux autres, on les voyait bien exécuter l'acte, mais il était difficile de se rendre compte de la façon dont ils avaient été impressionnés : si on les interrogeait, si on leur demandait pourquoi ils avaient obéi, ils répondaient en général que c'était par simple politesse. L'auteur a raison de douter qu'une telle explication soit valable pour un si grand nombre de cas. Analysant son expérience, il a cherché à se rendre compte des raisons pour lesquelles elle restait obscure. Pour qu'une suggestion réussisse à l'état de veille, il faut réunir un certain nombre de conditions qui ont pour but de procurer au sujet un état de calme physique et moral et de diminuer son pouvoir de résistance. Or, lorsqu'on adresse à haute voix une injonction à une personne, on emploie la suggestion directe, qui a toujours le tort d'éveiller la résistance ; de là les insuccès fréquents. L'auteur pense que ce sont surtout les suggestions indirectes qui réussissent pendant l'état de veille, et les suggestions directes pendant l'état d'hypnotisme. Cette formule présente une netteté très curieuse, mais nous doutons qu'elle soit absolument juste, et puisse convenir à tous les cas. Ce qui me paraît entièrement vrai, c'est que la résistance du sujet peut faire échouer les suggestions directes. Cette cause d'échec est moins à craindre pendant l'état d'hypnotisme, mais elle n'y subsiste pas moins, et je me rappelle plus d'un sujet rebelle qui a mis dans un grand embarras son opérateur : un jour que Charcot montrait quelques-unes de ses hypnotisées à des étrangers, il voulut faire écrire à l'une d'elles une reconnaissance de dette égale à un million ; l'énormité du chiffre provoqua de la part de l'hypnotisée une résistance invincible, et pour la décider à donner sa signature il fallut se borner à lui faire souscrire une dette de cent francs. D'autre part, j'ai bien constaté que pendant l'état d'hypnotisme, les suggestions données sous une forme indirecte sont très effectives ; au lieu de dire à une malade rebelle : «Vous allez vous lever !» on obtient un effet qui quelquefois est plus sûr, en se contentant de dire à demi-voix à un assistant : «Je crois qu'elle va se lever.» Suivant les circonstances, tel mode de suggestion réussit et tel autre mode échoue. Mais revenons à l'étude de l'état normal. Il faut distinguer les suggestions de sensations et d'idées et les suggestions d'actes ; ces dernières sont toujours difficiles à réaliser, car elles impliquent d'une part commandement et d'autre part obéissance, et il est bien vrai qu'un ordre donné sur un ton autoritaire a quelque chose d'offensant qui excite un sujet à la résistance. Il y aurait donc lieu d'imaginer une forme d'expérience un peu différente de celle de Sidis. Un petit détail, assez insignifiant en apparence, est à relever dans les descriptions de cet auteur. Avant de donner sa suggestion, dit-il, il avait soin d'engager la personne à regarder un point fixe pendant vingt secondes. Il ne dit pas pourquoi il a employé cette fixation du regard, ni si les sujets qui n'avaient pas eu soin de regarder fixement un point étaient plus suggestibles que les autres. Je pense que cette pratique, qui rappelle beaucoup le procédé de Braid pour hypnotiser, devrait être étudiée avec soin dans ses conséquences psycho-physiologiques. La recherche de Sidis ne comporte point une étude de détail, de psychologie individuelle sur la suggestibilité ; elle nous apprend seulement qu'on peut faire des suggestions d'actes sur des élèves de laboratoire et réussir ces suggestions. C'est le fait même de la suggestibilité qui est mis ici en lumière, et pas autre chose. L'étude de Sidis a donc ce même caractère préliminaire que les études bien antérieures de Yung. Un autre auteur, Bérillon, qui s'est beaucoup occupé de l'hypnotisation des enfants comme méthode pédagogique, vient de publier un opuscule [L'hypnotisme et l'orthopédie mentale, par E. Bérillon, Paris, Rueff. 1898.] où il rapporte plusieurs exemples de suggestion donnée à l'état de veille. Ces observations ne rentrent pas absolument dans le cadre de notre travail, car, ainsi que nous l'avons annoncé, nous ne nous occuperons point des suggestions dites de l'état de veille, lorsqu'elles sont données d'après les mêmes méthodes que la suggestion de l'hypnotisme ; cependant nous croyons devoir dire un mot des recherches de Bérillon, à cause de la curieuse assertion dont il les accompagne. D'après son expérience, des enfants imbéciles, idiots, hystériques, sont beaucoup moins facilement hypnotisables et suggestibles que «les enfants robustes, bien portants, dont les antécédents héréditaires n'ont rien de défavorable». Ces derniers seraient «très sensibles à l'influence de l'imitation. Ils s'endorment souvent, lorsqu'on a endormi préalablement d'autres personnes devant eux, d'une façon presque spontanée. Il suffit de leur affirmer qu'ils vont dormir pour vaincre leur dernière résistance. Leur sommeil a toutes les apparences du sommeil normal, ils reposent tranquillement les yeux fermés [Op. cit., p. 10.]». Voici maintenant ce que l'auteur pense de ceux qui résistent aux suggestions : «Au point de vue purement psychologique, la résistance aux suggestions est aussi intéressante à constater qu'une extrême suggestibilité. Elle dénote un état mental particulier et souvent même un esprit systématique de contradiction dont il faut neutraliser les effets. Parfois cette résistance est inspirée par des motifs dont il y a lieu de ne pas tenir compte. Le plus fréquent de ces motifs est la peur de l'hypnotisme, que nous arrivons assez facilement à dissiper. «Le degré de suggestibilité n'est nullement en rapport avec un état névropathique quelconque. La suggestibilité, au contraire, est en rapport direct avec le développement intellectuel et la puissance d'imagination du sujet. Suggestibilité, à notre avis, est synonyme d'éducabilité. «Le diagnostic de la suggestibilité.—Ce diagnostic peut être fait à l'aide d'une expérience des plus simples. Cette expérience a pour objet d'obtenir chez le sujet la réalisation d'un acte très simple, suggéré à l'état de veille. Voici comment je procède : «Après avoir fait le diagnostic clinique et interrogé l'enfant avec douceur, je l'invite à regarder avec une grande attention un siège placé à une certaine distance, au fond de la salle, et je lui fais la suggestion suivante : «Regardez attentivement cette chaise ; vous allez éprouver malgré vous le besoin irrésistible d'aller vous y asseoir. Vous serez obligé d'obéir à ma suggestion, quel que soit l'obstacle qui vienne s'opposer à sa réalisation.» «J'attends alors le résultat de l'expérience. Au bout de peu de temps (une ou deux minutes) on voit ordinairement l'enfant se diriger vers la chaise indiquée, comme poussé par une force irrésistible, quels que soient les efforts qu'on fasse pour le retenir. Dès lors je puis poser mon pronostic, et déclarer que cet enfant est intelligent, docile, facile à instruire et à éduquer et qu'il a de bonnes places dans sa classe. Je puis ajouter qu'il sera très facile à hypnotiser. «Si l'enfant reste immobile, et déclare qu'il n'éprouve aucune attraction vers le siège qui lui est désigné, je puis conclure de ce résultat négatif qu'il est mal doué au point de vue intellectuel et mental, et qu'il sera facile de retrouver chez lui des stigmates accentués de dégénérescence. L'opinion des maîtres et des parents vient toujours confirmer ce diagnostic.» On sera sans doute étonné, de prime abord, qu'un auteur voie dans la suggestibilité des signes d'éducabilité ; les hypnotiseurs nous ont du reste habitués aux affirmations tranchantes et inattendues. Delboeuf n'a-t-il pas soutenu que l'hypnotisme exalte la volonté humaine ? Nous pensons inutile de décrire à nouveau ce que nous entendons par état de suggestibilité, état dans lequel il y a une suspension de l'esprit critique, et une manifestation de la vie automatique, et par conséquent nous n'insisterons pas pour prouver qu'un développement anormal de l'automatisme ne saurait en aucune façon être une preuve d'intelligence. En somme, ce sont là des discussions théoriques, qui n'engendrent pas toujours la conviction, et il vaut bien mieux traiter la question sous une forme expérimentale. Sur ce dernier point, je crois intéressant de remarquer que Bérillon se contente d'affirmer sans rien prouver. On aurait été curieux d'avoir sous les yeux une statistique de bons élèves et de mauvais élèves, et d'étudier le pourcentage des hypnotisables dans ces deux catégories. C'est ainsi que nous procédons en psychologie expérimentale, nous donnons nos chiffres, et nous les laissons parler. L'habitude maintenant est si bien prise que lorsque nous rencontrons une affirmation sans preuves, nous la considérons comme une impression subjective, sujette à des erreurs de toutes sortes. Voilà ce qu'aurait dû se rappeler un auteur américain, M. Luckens [Luckens. Notes abroad, Pedagogical Seminary, 10, 1898.], qui dit avoir été très frappé, dans une visite faite à Bérillon, de cette assimilation de la suggestibilité à l'éducabilité ; il aurait dû demander des preuves, et jusqu'à ce qu'elles lui eussent été fournies, suspendre son jugement [Je crois devoir ajouter quelques remarques sur les rapports pouvant exister entre la suggestibilité d'une personne et son intelligence. Il me paraît incontestable qu'un certain degré d'intelligence est nécessaire pour comprendre la suggestion donnée, et une personne qui ne comprendra pas une suggestion trop complexe pour son intelligence se trouvera, par ce fait même, incapable de l'exécuter ; l'échec ne viendra pas de son défaut de suggestibilité, mais de son défaut d'intelligence. Je prends tout de suite un exemple : un enfant d'école primaire ne pourra pas, par suggestion, résoudre une équation à deux inconnues, ou faire un problème de calcul intégral. Dans ce sens, on peut dire que l'intelligence du sujet n'est pas sans relation avec sa suggestibilité. Nous rencontrons du reste cette relation lorsque nous nous adressons pour nos recherches aux enfants très jeunes ; à cinq ans, et à six ans, un enfant me paraît être en général beaucoup plus suggestible qu'à neuf ans ; mais son extrême suggestibilité se trouve neutralisée dans bien des cas par son incapacité à comprendre la suggestion.]. J'ai fait il y a cinq ans environ, en collaboration avec V. Henri, des expériences de suggestion qui rentrent dans cette catégorie, c'est-à-dire qui sont la mise en oeuvre de l'autorité morale ; ce n'étaient point des suggestions d'actes ou de sensations ; la suggestion était dirigée de manière à troubler seulement un acte de mémoire. Une ligne modèle de 40 millimètres de longueur étant présentée à l'enfant, il devait la retrouver, par mémoire ou par comparaison directe, dans un tableau composé de plusieurs lignes, parmi lesquelles se trouvait réellement la ligne modèle. Au moment où il venait de faire sa désignation, on lui adressait régulièrement, et toujours sur le même ton, la phrase suivante : «En êtes-vous bien sûr ? N'est-ce pas la ligne d'à côté ?» Il est à noter que sous l'influence de cette suggestion discrète, faite d'un ton très doux, véritable suggestion scolaire, la majorité des enfants abandonne la ligne d'abord désignée et en choisit une autre. La répartition des résultats montre que les enfants les plus jeunes sont plus sensibles à la suggestion que leurs aînés : en outre, la suggestion est plus efficace quand l'opération qu'on cherche à modifier est faite de mémoire que quand elle est faite par comparaison directe (c'est-à-dire le modèle et le tableau de lignes se trouvant simultanément sous les yeux de l'enfant) ; voici quelques chiffres : NOMBRE DES CAS OÙ LES ENFANTS ONT CHANGÉ LEUR RÉPONSE Dans la mémoire. Dans la comparaison directe. Moyenne. Cours élémentaire Cours moyen Cours supérieur 89% 80% 54% 74% 73% 48% 81,5% 76,5% 51,0% Dans ces chiffres sont confondus les enfants qui, avant la suggestion, ont fait une désignation exacte de la ligne égale au modèle, et les enfants qui ont fait une désignation fausse. Il faut maintenant distinguer ces deux groupes d'enfants, dont chacun présente un intérêt particulier. Les enfants qui se sont trompés une première fois font en général une désignation plus exacte, grâce à la suggestion ; ainsi, si l'on compte ceux dont la seconde désignation se rapproche plus du modèle que la première, on en trouve 81 p. 100, tandis que ceux qui s'en éloignent davantage forment une petite minorité de 19 p. 100. Quant aux enfants qui ont vu juste la première fois, ils sont remarquables par la fermeté avec laquelle ils résistent à la suggestion, qui, dans leur cas, est perturbatrice ; 56 p. 100 seulement abandonnent leur première opinion, tandis que dans le cas d'une réponse inexacte, il y en a 72 p. 100 qui changent de désignation. Je ferai remarquer que cette étude de V. Henri et de moi a été conçue dans un esprit un peu différent de celui qu'on trouve dans d'autres travaux du même genre. Nous ne nous sommes pas simplement proposés de montrer que les enfants, ou que tels et tels enfants sont suggestibles, mais nous avons cherché à préciser le mécanisme de cette suggestibilité, en étudiant les conditions mentales où la suggestion réussit le mieux ; on a vu que la suggestion réussit le mieux dans les cas où la certitude de l'enfant, sa confiance est le plus faible, par exemple lorsqu'il fait sa comparaison de mémoire au lieu de faire une comparaison directe, ou lorsqu'il a fait une première comparaison erronée ; d'où l'on pourrait déduire cette règle provisoire que : la suggestibilité d'une personne sur un point est en raison inverse de son degré de certitude relativement à ce point. Il y a donc un progrès, me semble-t-il, entre cette recherche de V. Henri et de moi, et quelques-unes des recherches antérieures. Nous ne nous sommes pas contentés d'observer l'existence de la suggestibilité à l'état de veille, nous avons en outre pu apprécier les degrés de cette suggestibilité, ce qui nous a permis d'établir que ce degré varie avec l'âge de l'enfant, et varie aussi suivant la justesse de son coup d'oeil ou suivant qu'il fait la comparaison avec la mémoire ou avec sa perception. Mais hâtons-nous d'ajouter que l'appréciation que nous avons pu faire des degrés de suggestibilité est encore bien rudimentaire ; pour savoir que les enfants sont plus suggestibles à tel âge qu'à tel autre, et dans telle condition que dans telle autre, qu'avons-nous fait ? Nous avons employé la méthode statistique ; à tel âge, avons-nous calculé, il y a 81 enfants sur 100 qui obéissent à la suggestion, tandis qu'à un âge plus avancé, on n'en trouve plus que 51 pour 100 de suggestibles. Ce procédé d'évaluation n'est possible qu'à la condition d'opérer sur un grand nombre de sujets ; évidemment, ce n'est pas un procédé directement applicable à la psychologie individuelle ; il ne pourrait pas servir à déterminer dans quelle mesure un enfant particulier est suggestible. Dernièrement, un anthropologiste italien, Vitale Vitali [Studi antropologici, Forli, 1896, p. 97.], a reproduit nos expériences dans les écoles de la Romagne, et il est arrivé à des résultats encore plus frappants que les nôtres. Il a constaté comme nous que les changements d'opinion se font bien plus facilement dans l'opération de mémoire que dans la comparaison directe ; le nombre de ceux qui changent d'opinion est à peu près le double dans le premier cas ; il a vu aussi que cette suggestibilité diminue beaucoup avec l'âge, et enfin qu'elle est moins forte chez ceux qui ont vu juste la première fois que chez ceux qui s'étaient trompés. Nos chiffres étaient les suivants : pour ceux ayant vu juste la première fois, les suggestibles étaient de 56 p. 100, tandis que pour ceux qui s'étaient trompés, les suggestibles étaient de 72 p. 100. Les résultats de Vitale Vitali sont encore plus nets ; pour le premier groupe, il trouve 32 p. 100, et pour le second 80 p. 100. C'est donc une confirmation sur tous les points. Le même auteur a imaginé une variante curieuse de l'expérience susdite, en appliquant deux pointes de compas sur la peau d'un élève, et en lui demandant, lorsque l'élève avait accusé une pointe ou deux : «En êtes-vous bien sûr ?» Les élèves de moins de quinze ans ont changé d'avis sous l'influence de cette suggestion, dans le rapport de 65 p. 100, et les élèves de plus de quinze ont changé dans le rapport de 44 p. 100 ; c'est une nouvelle démonstration de l'influence de l'âge sur la suggestibilité. Comme l'auteur le fait remarquer, cette méthode renferme une plus grande cause d'erreur que les exercices sur la mémoire visuelle des lignes, parce que le sens du toucher se perfectionne rapidement au cours des expériences et cela change les conditions. Ainsi que nous l'avons fait nous-mêmes, Vitali insiste sur l'importance de la personnalité de l'expérimentateur, personnalité qui fait beaucoup varier les résultats. Il déclare même qu'ayant répété après quelque temps les mêmes tests sur les mêmes sujets, il a trouvé des variations énormes. Nous croyons qu'il eût été utile d'étudier ces variations et d'en rechercher les causes. Cela est très curieux, et on pourrait bien, de cette manière, mesurer la suggestibilité du sujet par le nombre de fois qu'il perçoit une pointe au lieu de deux ; mais il aurait été très intéressant de savoir s'il y a quelque relation entre la suggestibilité de la personne et la finesse de sa sensibilité tactile ; c'est une question qui malheureusement n'a pas été examinée. Les expériences de MM. Henri et Tawney sont des expériences de suggestion ; voici pourquoi : il n'y a pas, à proprement parler, d'ordre donné sur un ton impératif ; mais l'idée préconçue de deux pointes est acceptée par le sujet pendant toute la séance parce qu'il a confiance dans la parole de l'opérateur et qu'il croit que l'opérateur est incapable de le tromper ; en effet, comme dans les laboratoires de psychologie on ne fait guère d'expériences de suggestion, les élèves ne sont point habitués à des expériences de mensonge, et ils ne songent pas à se méfier de ce qu'on leur dit. C'est donc de la suggestion dans le sens de confiance plutôt que dans le sens d'obéissance. Ce sont de petites nuances qui se préciseront sans doute dans les études ultérieures. J'ai repris dernièrement, avec M. Vaschide, sur 86 élèves d'école primaire élémentaire, la recherche de suggestion que j'avais commencée avec M. V. Henri ; seulement nous avons employé une méthode un peu plus rapide. M. Victor Henri a fait avec M. Tawney [Voir Année Psychologique, II, p. 295 et seq.] quelques expériences sur la sensibilité tactile, pour étudier l'influence de l'attente et de la suggestion sur la perception de deux pointes lorsqu'on ne touche qu'un seul point de la peau ; avant chaque expérience on montrait au sujet le compas avec les deux pointes présentant un écart bien déterminé ; puis le sujet fermait les yeux, et on touchait sa peau avec une seule pointe ; sous l'influence de cette suggestion, les appréciations du sujet sont profondément troublées ; le plus souvent, il perçoit deux pointes au lieu d'une, et de plus, il juge l'écart d'autant plus grand que l'écart réel qu'on lui a montré est plus grand. L'expérience avait été confiée à M. Michel, directeur de l'école ; c'était lui seul qui parlait et expliquait, nous restions simples témoins. M. Michel se rendait donc avec nous dans les classes, il faisait distribuer aux élèves du papier et des plumes, il faisait écrire sur chaque feuille les noms des élèves, la classe, le nom de l'école, la date du jour et l'heure ; puis après ces préliminaires obligés de toute expérience collective, il annonçait qu'il allait faire une expérience sur la mémoire des lignes, des longueurs ; une ligne tracée sur un carton blanc serait montrée pendant trois secondes à chaque élève, et chaque élève devait, après avoir vu ce modèle, s'empresser de tracer sur sa feuille une ligne de longueur égale. M. Michel allait ensuite de banc en banc, et montrait à chaque élève la ligne tracée ; par suite de la discipline parfaite que notre distingué collaborateur sait faire régner dans son école, les élèves restaient absolument silencieux, et aucun ne voyait la ligne deux fois. Il fallait environ soixante-dix secondes pour montrer la ligne à tous les élèves de la classe. Ceci terminé, M. Michel remontait en chaire et annonçait qu'il allait montrer une seconde ligne un peu plus grande que la première ; cette affirmation était faite d'une voix forte et bien timbrée, avec l'autorité naturelle d'un directeur d'école ; mais l'affirmation n'avait lieu qu'une fois, et collectivement, M. Michel s'adressant à toute la classe. Or, la seconde ligne n'avait que 4 centimètres de longueur, alors que la première en avait 5. La seconde ligne était montrée à chaque élève, exactement comme on avait fait pour la première fois. Entre ces deux expériences s'écoulait pour chaque élève un temps moyen de deux à trois minutes. Cette épreuve a été faite sur 86 enfants, comprenant les trois premières classes de l'école primaire, et âgés de neuf à quatorze ans. Quels ont été les résultats ? Notons tout d'abord que la reproduction de la première ligne—ce qui est une pure expérience de mémoire, sans suggestion d'aucune sorte—donne lieu à d'énormes différences individuelles, comprises, pour la première classe, entre deux extrêmes : 60 millimètres et 28 millimètres ; la ligne avait en réalité 50 millimètres ; or, il y a eu seulement trois élèves sur vingt-cinq qui ont dessiné une ligne égale ou supérieure au modèle ; tous les autres ont dessiné une ligne plus petite ; par conséquent, on peut affirmer qu'il y a bien (comme nous l'avons vu autrefois), une tendance des enfants à diminuer la longueur des lignes de 50 centimètres en les reproduisant dans la mémoire. Dans la deuxième classe, il y a eu 3 élèves reproduisant une ligne supérieure à 50 ; tous les autres élèves ont reproduit des lignes plus courtes ; enfin, semblablement, dans la troisième classe, nous n'en trouvons que deux dessinant une ligne plus longue que le modèle, tous les autres ont fait plus court. En examinant quelle différence les élèves ont indiquée entre la première ligne (50 millimètres) et la seconde (40 millimètres) on trouve que bien peu d'élèves ont jugé réellement la seconde ligne plus petite que la première ; par conséquent, la suggestion a été efficace ; 9 élèves seulement, sur les 86 des trois classes, ont dessiné une seconde ligne plus courte ; on peut donc dire que 9 élèves seulement ont résisté à la suggestion et ont cru au témoignage de leur mémoire plus qu'à la parole de leur maître ; et encore, cette remarque comporte une réserve ; il est probable que ces réfractaires ont quand même été un peu influencés par la suggestion, car un seul a rendu la seconde ligne plus petite de 10 millimètres, ce qui était l'écart réel ; tous les autres ont amoindri cette différence ; 2 l'ont faite de 7 millimètres, 2 l'ont faite de 5, etc. Ils ont composé entre le témoignage de leur mémoire et la parole du maître. Quant à ceux qui, obéissant à la suggestion, ont dessiné la seconde ligne plus grande que la première, ils présentent des degrés très différents de suggestibilité. Les écarts ont pu atteindre 10 millimètres assez fréquemment, et une fois même, l'écart a dépassé 20 millimètres, ce qui veut dire qu'au lieu de faire la seconde ligne plus courte de 10 millimètres, le sujet a été tellement docile à la suggestion, qu'il a fait la seconde plus longue de 20 millimètres ; en d'autres termes, la suggestion a produit dans ce cas extrême, une erreur de 30 millimètres, erreur énorme si on considère qu'elle a porté sur une longueur totale de 50 millimètres. En moyenne, on a fait la seconde ligne plus grande de 6 millimètres et comme elle était en réalité plus petite de 10 millimètres, l'erreur totale est de 1 cm. 5 environ. Il est à remarquer que les enfants les plus jeunes se sont montrés les plus suggestibles. Nous trouvons en effet, dans la première classe, que 7 élèves seulement ont fait la seconde ligne de 5 millimètres plus grande que la première ; au contraire, dans la troisième classe, le nombre d'élèves qui sont dans ce cas est de 16. Du reste, dans nos expériences antérieures avec M. Henri sur la suggestibilité scolaire, nous avions aussi constaté que les plus jeunes enfants ont plus de suggestibilité que les enfants plus âgés. La description que nous avons donnée de notre expérience de suggestion n'est pas complète ; nous l'avons poussée plus loin. Lorsque tous les élèves eurent reproduit de mémoire la ligne de 40 millimètres, le directeur de l'école leur présenta une troisième ligne, longue de 50 millimètres, et il leur dit avant de la présenter : «Je vais vous présenter une troisième ligne qui est un peu plus courte que la seconde.» En faisant cette nouvelle tentative de suggestion, nous avions deux raisons ; la première était de chercher à vérifier l'épreuve précédente, la seconde était de savoir s'il est possible de donner successivement plusieurs suggestions du même genre sans nuire au résultat. Cette seconde suggestion a été moins efficace que la première ; les élèves semblent s'être mieux rendu compte de la longueur vraie des lignes ; tandis que la première fois 5 élèves seulement avaient fait un dessin en sens contraire de la suggestion, on en trouve 16 dans le même cas à la seconde reprise. Il nous a paru nécessaire d'examiner nos résultats de plus près, et de rechercher si chaque élève avait présenté pendant les deux épreuves la même suggestibilité ou la même résistance. Nous allons diviser tous nos sujets en cinq groupes : 1° ceux qui ont fait à la première suggestion une seconde ligne moindre que la première (ce sont les élèves les plus exacts) ; 2° ceux qui ont fait à la première suggestion une seconde ligne égale à la première, ou supérieure de 1, 2 à 4 millimètres ; 3° ceux qui ont fait à la première suggestion une seconde ligne supérieure de 4 à 8 millimètres ; 4° ceux qui ont fait à la première suggestion la seconde ligne supérieure de 8 à 12 millimètres ; enfin, 5° ceux qui ont fait à la première suggestion la seconde ligne supérieure de 12 à 20 millimètres. On voit que ce groupement exprime l'ordre de suggestibilité, les élèves du cinquième groupe se sont montrés plus suggestibles que ceux du quatrième groupe, et ainsi de suite jusqu'au premier groupe. Or voici les résultats donnés par ce calcul : Ordre des Groupes Nombre de Sujets Suggestion d'allongement de la ligne Suggestion de raccourcissement de la ligne 1er 2e 3e 4e 10 28 31 15 - 4,6 + 3,07 + 5,99 +12,9 + 2 - 2,35 - 3,06 - 8,66 Ces chiffres, pour être clairs, exigent une courte explication. Dans la première épreuve, rappelons-le, la seconde ligne présentée était plus courte que la première de 10 millimètres, mais la suggestion donnée était que cette seconde ligne était la plus longue. Par conséquent, les élèves qui l'ont dessinée plus courte, comme ceux de notre premier groupe qui l'ont dessinée avec une longueur moindre de 4mm,6, ont été plus exacts que ceux du deuxième groupe, qui ont donné à cette ligne une longueur plus grande que la première, plus grande de 3mm,07 ; à leur tour, les sujets du second groupe ont été plus exacts que ceux du troisième et ceux du quatrième groupes, puisque ceux-ci ont allongé encore davantage la seconde ligne, qui était cependant plus courte. Il est donc bien clair que nous avons établi nos quatre groupes dans l'ordre de la suggestibilité croissante. Or, qu'on comprenne bien ce point, ce sont les sujets formant chacun de ces quatre groupes dont on a cherché à apprécier les résultats dans la seconde épreuve ; nous avons voulu savoir si les élèves A, B, C, etc., formant le premier groupe, le meilleur, le plus résistant à la suggestion de la première épreuve ont manifesté les mêmes qualités d'exactitude et de résistance à la suggestion dans la seconde épreuve ; et pour cela, nous avons calculé les écarts de lignes présentés par ces sujets dans cette seconde épreuve. Seulement, il faut se souvenir que dans la seconde épreuve la suggestion donnée était une suggestion de raccourcissement ; et que la ligne qu'on présentait à dessiner était réellement plus grande que la précédente ; par conséquent, les élèves les plus exacts à cette seconde épreuve sont ceux qui ont dessiné la ligne plus grande que la précédente ; et parmi ceux qui l'ont dessinée plus courte, les plus exacts sont ceux qui ont le moins exagéré cette différence en moins. Ces explications feront comprendre les oppositions de signe algébrique que l'on rencontre dans les résultats des épreuves pour un même groupe de sujets. Il est clair maintenant qu'il existe une concordance bien remarquable entre les deux épreuves ; on voit en effet, que les élèves du premier groupe qui avaient résisté à la suggestion d'allongement de la première épreuve ont également résisté à la suggestion de raccourcissement de la seconde épreuve, puisqu'ils ont dessiné la troisième ligne avec 2 millimètres en plus tandis que la suggestion tendait à la faire dessiner plus petite ; de même, on voit dans les groupes suivants que plus un groupe a obéi à la suggestion d'allongement de la première épreuve, plus il a obéi à la suggestion de raccourcissement de la seconde. Le résultat est aussi net qu'on peut le souhaiter. Qu'est-ce que ces expériences nous apprennent de plus sur la suggestibilité des enfants ? C'est là une question utile qu'on devrait se poser à propos de chaque étude nouvelle. Nos expériences fournissent un nouveau moyen, d'une efficacité vérifiée, pour mesurer la suggestibilité des enfants ; et le procédé nous paraît recommandable puisqu'il fait apparaître de très grandes différences individuelles. Nous avons pu constater en outre que les enfants les plus suggestibles sont ceux de la troisième classe, c'est-à-dire les plus jeunes. Cette épreuve nous a montré la possibilité de faire à la suite l'une de l'autre deux exercices de suggestibilité, dans lesquels les enfants se comportent à peu près de la même manière, et gardent chacun leur degré propre de suggestibilité ; cette confirmation est très importante ; elle nous montre que la suggestibilité présente un certain caractère de constance, au moins lorsque l'expérience est bien conduite. Enfin, nous avons eu à noter qu'une suggestion répétée a moins d'efficacité la seconde fois que la première : cet affaiblissement est sans doute spécial à ces suggestions indirectes de l'état de veille, qui ne constituent point à proprement parler des mains-mises sur l'intelligence des individus ; dans les expériences d'hypnotisme, au contraire, la suggestibilité de l'individu hypnotisé croît avec le nombre des hypnotisations. M. Michel m'a communiqué le classement intellectuel que les professeurs ont fait des élèves qui ont servi à ces expériences ; le classement est, comme c'est l'habitude, tripartite ; les élèves sont divisés en : 1° intelligence vive ; 2° intelligence moyenne ; et 3° intelligence faible. Je désirais savoir si l'intelligence des élèves—il s'agit ici bien entendu d'une intelligence toute spéciale, qu'on pourrait appeler l'intelligence scolaire—présente quelque relation avec la suggestibilité. C'est, on se le rappelle, l'opinion de M. Bérillon. Je ne suis point arrivé à la confirmer. La suggestibilité moyenne est à peu près la même dans les 3 groupes. De notre expérience collective à une expérience de cours il n'y a qu'un pas. Dans une courte note publiée récemment par Psychological Review [A Lecture Experiment in Hallucinations. Psychological Review, VI, 4, juillet 1899, p. 407-408.], E.E. Slosson relate une expérience de suggestion qu'il a faite sur ses auditeurs dans un cours public ; la suggestion a consisté à produire l'hallucination d'une odeur forte. L'auteur verse sur du coton l'eau d'une bouteille, en écartant la tête, puis il annonce qu'il est certain que personne ne connaît l'odeur du composé chimique qui vient d'être versé, et il émet l'espoir que quoique l'odeur soit forte et d'une nature toute particulière, personne n'en sera incommodé. Pour savoir quelle serait la rapidité de diffusion de cette odeur, il demande que toutes les personnes qui la sentiront s'empressent de lever la main ; 15 secondes après, les personnes du premier rang donnaient ce signal, et avant la fin d'une minute les trois quarts de l'auditoire avaient succombé à la suggestion. L'expérience ne fut pas poussée plus loin, car quelques spectateurs, désagréablement impressionnés par cette odeur imaginaire, se préparaient déjà à quitter la place. On les rassure et on leur explique que le but réel de l'expérience avait été de provoquer une hallucination ; cette explication ne choqua personne. Voilà à peu près quelles sont les études qui ont été faites jusqu'ici sur la suggestibilité ou suggestion à l'état de veille et chez les sujets normaux. Il semble que quand elle est réduite à sa forme la plus simple, l'épreuve de la suggestion à l'état de veille constitue un test de docilité ; et il est vraisemblable que des individus dressés à l'obéissance passive s'y conformeront mieux que les indépendants. Rappelons-nous ce fait si curieux, que d'après les statistiques de Bernheim les personnes les plus sensibles à l'hypnotisme—c'est-à-dire à la suggestion autoritaire—ne sont pas, comme on pourrait le croire, les femmes nerveuses, mais les anciens militaires, les anciens employés d'administration, en un mot, tous ceux qui ont contracté l'habitude de la discipline et de l'obéissance passive.

lundi 16 avril 2012

MELIES, Marie Georges Jean (1861-1938).


Magicien et cinéaste français.
Décoré de la Légion d’honneur (1931).
Alors qu’il est envoyé à Londres par son père (qui dirige une fabrique de chaussures) afin d’améliorer son expression anglaise, il se rend à un spectacle du prestidigitateur David Devant (1868-1941, président du Magic Circle, voir notice) à l’Egyptian Hall.
En échange de décors, (qu’il peint et réalise), David Devant lui livre quelques-uns de ses secrets d’illusionniste.
(Plus tard, il filmera son ami David Devant, qui projette des films lors de ses spectacles, D. Devant, prestidigitation).
De retour dans la Capitale, il se produit au Théâtre Fantastique situé dans le Musée Grévin.
Il rachète le Théâtre Robert-Houdin (avec ses parts de la société familiale) dont il assure la direction pendant 36 ans.
Dans ce cadre propice aux inventions, il projette ses films réalisés depuis les procédés des frères Lumière (Louis et Auguste Lumière, 1862-1954).
Ses premiers trucages cinématographiques resteront célèbres, faisant de lui l’un des pionniers du cinéma magique.
Créateur en 1891 de l'Académie de Prestidigitation, future Chambre syndicale de la prestidigitation (en 1904).
Il lance sa société de production Star Film, produisant ses premiers films dans un petit studio (le premier dans l’histoire du cinéma français) situé dans son domicile de Montreuil.
Sa première contribution à l’Art magique au cinéma (en 1896) est « Escamotage d'une dame au théâtre Robert-Houdin » : sous les traits d’un prestidigitateur, il fait disparaître son épouse l’actrice Jeanne d’Alcy (1865-1956), remplacée sous un épais rideau de fumée par un squelette.
Il réalisera six cents courts-métrages entre 1896 et 1914 intégrés dans une série : voyages à travers l'impossible.
Son emblématique Le Voyage dans la Lune (1902) adapté du roman de Jules Verne De la Terre à la Lune, reste son chef-d'œuvre, dans lequel il développe toute sa technique d’illusionniste du 7e Art. Il inaugure un nouveau genre : la féerie, ancêtre de la science-fiction.
Sa fin de carrière est moins glorieuse, allant jusqu’à la faillite en 1923.
Retrouvant son ancienne actrice Jeanne d’Alcy en 1925, il l’assiste dans sa boutique de jouets et de sucreries située dans la gare Montparnasse à Paris.
Léon Druhot (directeur de Ciné-Journal) qui le croise par hasard, s’émeut devant ces coups du sort et entreprend de le réhabiliter.
Son ami Maurice Noverre (né Marie Joseph Maurice Eugène Hellis en 1881) lui rend hommage dans un propos, Celui qu’on oublie, prononcé dans le cadre du gala Méliès (le 16 décembre 1929) dans la salle du Studio 28, le mythique cinéma de Montmartre.
M. Noverre rédacteur du Le Nouvel art cinématographique publiera en octobre 1929 : L'oeuvre de Georges Méliès : étude rétrospective sur la première entreprise industrielle de cinématographie théâtrale (1896-1914), en avril 1930 : Après le gala Méliès, Georges Méliès, le Jules Verne du cinéma, en janvier 1930 : Le gala Méliès.
Méliès obtient la Légion d'honneur en 1931 pour l’ensemble de son œuvre.
En 1932, il est placé au château d'Orly (propriété de la ville d'Orly depuis 1946), maison de retraite de la Mutuelle du cinéma (fondée en 1921 par Léon Brézillon) aux côtés de sa seconde épouse Jeanne d’Alcy (née Charlotte Faës, 1865-1956).
Auteur de :
Georges Méliès, Maurice Bessy, Lo Duca, Georges Méliès mage et Mes Mémoires par Méliès,
Paris : Prisma, 1945.
Bibliographie :
In L’Escamoteur, sous la direction de Robelly, années 1947 à 1951, pp. 117, 132, 1019, 1146, 1150, 1326, 1425, 1446, 1449, 1471, 1473, 1534, 1726, 1748, 1774, 1802, 1884, 1890, 1902, 1944.
Jacques Malthête, Michel Marié, Georges Méliès, l’illusionniste fin de siècle ?, Actes du colloque de Cerisy-la-Salle, 13-22 août 1996, Presses Sorbonne Nouvelle, 1997.
Jacques Malthête, Laurent Mannoni, Méliès : Magie et cinéma, Cinémathèque française, Cinémathèque Méliès, Paris Musées, 2002.
Figures loufoques à la fin du XXe siècle, Art et Littérature, sous la direction de Jean-Pierre Mourey et Jean-Bernard Vray, Publications de l’Université de Saint-Étienne, 2003.
Filmographie (pour la télévision) :
Méliès ou le magicien de Montreuil-sous-Bois, de Jean-Christophe Averty avec Jean-Marc Thibault, Michel Seldow, 1964.© Un Tour du Monde de la Magie et des Illusionnistes.
Les reproductions totales ou partielles des notices du blog Reflets du Passé sont soumises au droit d’Auteur.

L’impressionniste fin de siècle, de, et avec Georges Méliès, 30 novembre 1898

HAMILTON, Pierre Etienne Auguste Chocat, dit (1812-1877).


Magicien français.
Beau-frère de Jean-Eugène Robert-Houdin (1805-1871).
Il débute en 1849, comme élève de Robert-Houdin qui l'initie à la magie, et à l'administration du théâtre. Il se marie avec la sœur de son maître.
En 1850, il prend la succession de Robert-Houdin et de son théâtre parisien (Théâtre des soirées fantastiques) déménageant du Palais Royal au boulevard des Italiens (au n° 8).
Précision relevée par Robelly (1894-1975, Robert Rouet) dans un article signé Philippe Busoni, paru dans L’Illustration du 25 mars 1854.
Il y présente les automates et les expériences de son beau-frère.
Lui succèderont à la gestion du théâtre : Cleverman (l’homme habile, François Eugène Lahire, 1824-1875), Pierre Edouard Brunnet, Emile Robert-Houdin fils (horloger prestidigitateur, 1831-1883) ses associés Delinsky (probable magicien polonais à moins qu’il ne s’agisse ici d’une homonymie) Warner, et Mme Léonie Robert-Houdin (veuve de Emile Robert-Houdin).
Cette dernière revend, 17 ans après la mort de son créateur le théâtre à Georges Méliès (voir notice, 1861-1938) en 1888 pour 40.000 francs de l’époque (environ 100.000 euros) ; pour l’anecdote : en liquide.
Bibliographie :
In L’Escamoteur, sous la direction de Robelly, années 1947 à 1951, p. 285, 1019, 1049, 1242, 1294, 1414.
Jacques Deslandes, Histoire comparée du cinéma, Casterman, 1966.
Georges Sadoul, Bernard Eisenschitz, Lumière et Méliès, 1985.
Magic (notice in) The Columbia Encyclopedia, 2008.
© Un Tour du Monde de la Magie et des Illusionnistes.
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dimanche 15 avril 2012

MESMERISME


(Extrait du GUIDE du PARIS INITIATIQUE, édition Dualpha) :
Franz-Anton Mesmer (23 mai 1734 – 5 mars 1815 sur les bords du lac de Constance) fut souvent cité dans les ouvrages liés à la prestidigitation, à l’image du Chevalier (Gougenot des Mousseaux) incriminant une forme de magie, relative au mesmérisme et aux diverses formes de magnétisme. Le magnétisme devenant mesmérisme dans de nombreux programmes de magiciens (dont Neelakandan Namboothiri Vazhkkunnam, 1903-1983), le fameux Le baquet de Mesmer du magicien français Chaumont (1852-1927).
Charles Rey, puis Charles Fauque, dit Monsieur Harmington (1860-1947) se présente comme un illusionniste, disciple de Mesmer.
Franz Anton Mesmer (1734-1815) recevait à Paris, place Vendôme, depuis 1784 dans le cadre de ses séances de « baquets ».
Médecin allemand, il pratiquait une doctrine adepte d’un fluide universel, développant sa théorie par le biais d’un système : La Société de l’Harmonie.
En décembre 1784 le « Journal de Berlin » qualifiait pourtant Mesmer de magicien :
« A depuis douze ans perdu toute sa réputation dans sa partie, et qu’en 1775, l’académie des Sciences de Berlin avait déjà déclaré absurdes ses théorèmes ».
Un article du Mercure, du 22 janvier 1785 (p. 134) s’en fait l’écho : « On vient de dénoncer au public, dans le journal de Berlin, l’estampe qui représente le fameux thaumaturge comte de Cagliostro, dédiée à feu le comte de Milly, et tiré du cabinet de Mme la marquise d’Urfé. Le journaliste saisit cette occasion pour verser le ridicule sur toutes les inepties dont quelques sociétés d’alchimistes, tâchent d’infatuer l’Europe depuis quelques années.
Il est curieux , sans doute, de savoir ce qu’on pense de Mesmer, et de sa conduite en Allemagne. Le même auteur a consacré un article à ce médecin ; il dit que l’Allemagne use de représailles envers la France qui, après lui voir envoyé tant de charlatans dont on s’était moqué chez eux, vient de s’enthousiasmer pour un magicien allemand, qui après douze ans, avait déjà perdu toute sa réputation dans sa patrie. En 1775, l’Académie des Sciences de Berlin, déclara absurdes les théorèmes de M. Mesmer ».
Mesmer dira de cet épisode que « l’Académie des sciences était tombée au sujet du magnétisme, dans différentes erreurs, et que son avis avait été qu’il était dans l’illusion. »
(in La France trompée par les magiciens et démonolâtres du XVIIIe siècle, Fait démontré par des faits, par M. l’Abbé Fiard, à Paris chez Grégoire, libraire rue du Coq-Saint-Honoré n°135, 1803. p 48). Là ou Fiard place Cagliostro, Mesmer, Saint-Germain, dans la catégorie des sorciers, aux côtés d’escamoteurs réputés à l’image de Roberston et d’Olivier.
La fluidité de Mesmer revêt les traits du magnétisme minéral avec l’utilisation des aimants.
Il développera sa théorie en passant au stade de la propagation fluidique par le biais de l’eau et des miroirs. Les pratiques collectives des « baquets » où le patient plongeait dans une eau mélangée à de la limaille de fer connurent un certain succès même si elles restèrent teintées de « charlatanismes » pour bon nombre de sceptiques du corps médical.
De cette propagation novatrice du magnétisme, Mesmer développera une doctrine philosophique, le conduisant aux lisières des travaux maçonniques de son époque. Le temps semblait alors propice aux expérimentations, aux évolutions rapides mais aussi aux prises de risques intellectuelles et scientifiques.
Le corps médical évolua (pour partie) dans le sens suggéré par Mesmer : un professeur de la Faculté de Médecine de Paris, le docteur Delson développa la « magnétisation ».
Le 12 mars 1784 une commission aura en charge l’examen scientifique du « magnétisme animal » soulevé par Mesmer. Elle fut composée de 5 membres de l’académie des sciences : Franklin, Leroy, de Bory, Bailly, Lavoisier. De quatre médecins de la Faculté de Paris : D’Arcet, Guillotin, Majault, Sallin.
Bailly rédigea le rapport qui fut sans appel :
1/ : Il n’existe aucun agent qui mérite le nom de magnétisme animal.
2/ : Tous les résultats obtenus (par Mesmer) ne sont que les fruits de l’imagination.
3/ : Que les crises produites par les traitements pouvaient s’avérer très dangereuses.
La commission procédait alors à l’arrêt du mesmérisme.
Un rapport plus secret discréditait le mesmérisme en s’appuyant sur la moralité :
Le mesmérisme engendrait-il une relation fusionnelle entre le praticien et sa patiente ?
« L'homme qui magnétise a ordinairement les genoux de la malade renfermés dans les siens…La main est appliquée sur les hypocondres et quelques fois plus bas sur les ovaires…Il passe la main droite derrière le corps de la femme. L'un et l'autre se penchent pour favoriser ce double attouchement. La proximité devient plus grande, le visage touche le visage, les haleines se respirent…Il n'est pas extraordinaire que les sens s'allument…Le visage s'enflamme par degrés, l'oeil devient ardent, et c'est le signal par lequel la nature annonce le désir, les paupières deviennent humides, la respiration est courte, entrecoupée, la poitrine s'élève et s'abaisse rapidement. Les convulsions s'établissent…Le souvenir n'en est pas désagréable et les femmes n'ont pas de répugnance à le sentir à nouveau…
… Ainsi, en se proposant de guérir on excite des émotions agréables et chères, des émotions que l'on regrette parce qu'elles ont un charme naturel pour nous et que, physiquement elles contribuent à notre bonheur.
Mais moralement elles n'en sont pas moins condamnables, et elles sont d'autant plus dangereuses qu'il est facile d'en prendre la douce habitude."
Sur les personnalités des malades qui venaient consulter, de Gebelin sera prolixe :
« Ce sont des personnes de tout état, de tout sexe, incapables de tromper, et dont la plupart tiennent à des familles très distinguées : Ce sont des chevaliers de Saint-Louis, des Commandeurs de Malte, des Colonels de maisons titrées, personnes qui ne sont faites ni pour laisser séduire par un fol enthousiasme, ni pour s’abaisser à jouer une vile comédie. »

Dieudonné Alexandre Paul Boiteau


AMBLY, Paul Boileau d’
L’auteur Paul Boiteau d'Ambly publie en 1854 sous le pseudonyme de Dieudonné Alexandre Paul Boiteau, Les cartes à jouer et la cartomancie à Paris, Hachette. (dans le cadre de la bibliothèque des Chemins de Fer).
Il sera traduit en Angleterre par Taylor (Rev. Ed. S.), sous le titre The history of playing cards with anedoctes of their use in conjuring, fortune-telling, and card-sharping, London, John Camden Hotten, 1865, sans que l’original ne soit mentionné.
Une autre édition, précisant qu’il s’agit d’une traduction sortira sous le titre The history of playing cards and card-conjuring, chez J.C. Hotten en 1859.
Si l’ouvrage (richement illustré par 40 gravures) revient sur l’historique des cartes et du Tarot, il consacre néanmoins un chapitre à la prestidigitation.
On trouve aujourd’hui le livre en version numérisée mais rarement sur les rayonnages des libraires spécialisés.
Table des matières :
Entrée en matière, 1
Origine orientale des cartes, 4
Introduction des cartes dans le midi de l’Europe, 36
Date de l’introduction, 42
Introduction des cartes en France, 46
Création des cartes françaises et invention du jeu de piquet, 60
Histoire des tarots d’après les monuments, 78
Histoire des variations du jeu de cartes français, 103
Les cartes et la science, 130
Législation des cartes, 141
Commerce et fabrication, 151
Du jeu au XVet et au XVIe siècle, 157
Henri IV et Louis XIII, 171
Influence de Mazarin sur l’histoire du jeu, 186
Louis XIV et sa cour le jeu et ses pompes, 202
La Régence et Louis XV, 237
Les derniers temps de la monarchie, 258
Le jeu sous la République et sous l’Empire, 264
Le jeu des contemporains, 278
Mademoiselle Lenormant, 328
Tours de cartes et prestidigitation, 342
Conclusion, 357
Méthode pour tirer les cartes suivant les prescriptions, 369
Appendice bibliographique ou indication des sources, 383
L’auteur publie des ouvrages généralistes à vocation éducatives, citons :
Légendes pour les enfants, 1857.
Etat de la France en 1789, 1861.
Le régime des chemins de fer français, principes et application, 1875.

vendredi 13 avril 2012

ALLI-VAD, Aleksandre Alekseyevich Vadimov-Markelov, dit (1895–1967).


Magicien russe.
A. A. Vadimov (Alli-Vad), fils d’un artiste forain, démarre ses premières tournées dès l’âge de sept ans sous le pseudonyme de Volodia Zubritsky, dans le cirque Nikishin.
Il se montre un calculateur prodige (dans un registre proche de la Française Osaka, voir notice), à la mémoire prodigieuse (mnémotechnie) capable (à titre d’exemple) de préciser avec promptitude le jour de la semaine correspondant à une date.
Dès 1921 il se produit à Moscou puis à Petrograd (Saint-Pétersbourg) au sein du cirque
Chinizelly.
Cette frénésie de représentations se fait au détriment de son éducation et semble servir les intérêts pécuniaires de son impresario de père.
La science (à l’image du Français Inaudi, voir notice) s’intéresse à ses incroyables capacités intellectuelles. Il est l’objet d’une étude menée à Moscou.
Son père s’oppose à toutes ces investigations, préférant continuer à gérer la carrière de son fils.
Il doit pourtant se résoudre à interrompre les représentations se retrouvant mobilisé dans l’armée durant le premier conflit mondial.
Volodia n’a que treize ans lorsqu’il se décide pourtant à rejoindre un bataillon de volontaires de l'Armée rouge (unique moyen pour devenir indépendant).
Après 1921, installé à Kiev (Ukraine actuelle) il devient un illusionniste complet, reléguant ses anciennes prédispositions, en s’ouvrant à un répertoire classique.
De 1940 à 1943, il combat les nazis sur un dragueur de mines, obtenant le grade de Capitaine.
Il reprendra une brillante carrière sans jamais pourtant se retourner sur son passé.
Il signe des ouvrages sur le monde du cirque et sur les illusionnistes russes.
Auteur de :
A.A. Vadimov, Iskusstvo fokusa, Moscou, 1959.
A.A. Vadimov, MA Trivas, Ot magov drevnosti do illuzionistov nashikh dnei, Moscow, 1966.
Bibliographie :
Kio, Fokusy i fokusniki, Moscou, 1958.
Kio, Illiuzionisty i volshebniki, Moscou, 1959.
Gennady Trofimov, Miracle of the XX century, 1997.

dimanche 8 avril 2012

DE ROCROY, Pierre-Marie-André Dessertine, dit (1890-1962).


Le sorcier du Diable, le Roi des magiciens.
Magicien français né en Algérie.
Grande illusion et manipulations.
Durant la Seconde Guerre mondiale, il se produit au cirque Albert Rancy à Paris (Arènes du Grand Palais, dit Nouveau cirque des Champs Elysées).
De fait, il réalise l’ensemble de sa carrière principalement sous les grands chapiteaux entouré de son épouse et de sa belle-sœur.
Dans ce registre magique, il partage la vedette avec les illusionnistes Chefalo, Dante (1883-1955, voir notice) et The Great Carmo.
Auteur de :
Trucs et secrets dévoilés par le mystérieux De Rocroy, 1928.
Bibliographie :
Maurice Verne, Musées de volupté : le secret des nuits électriques, éditions des portiques, 1930.
Le Magicien, n° 5, Avril 1938.
In L’Escamoteur, sous la direction de Robelly, années 1947 à 1951, pp. 60, 106, 159.
Monica J. Renevey, Le Grand livre du cirque, Vol. 2, Bibliothèque des Arts, 1977.
Charles Degeldère, Dominique Denis, Cirques en bois, cirques en pierre : leur histoire à travers la carte postale, Association Arts des 2 mondes, 2003.
Richard Raczynski, Un Tour du Monde de la Magie et des Illusionnistes, Dualpha, 2011.